Mais qui s’en soucie réellement ?

Le 12 mai est le jour anniversaire de la naissance de Florence Nightingale. La Journée internationale de l'infirmière (JII), instaurée en 1965 par le Conseil international des infirmières, une fédération de plus de 130 associations nationales d’infirmières, représentant plus de 13 millions d'infirmières dans le monde entier, est là pour rappeler à tous combien les infirmier(e)s œuvrent pour garantir des soins infirmiers de qualité pour tous et pérennisent par leur apport de solides politiques de santé.

Au Maroc, cette journée n’est pas célébrée comme il se doit, tout au plus ce sont quelques initiatives de professionnels qui ont à cœur cette noble profession qui s’activent ici et là pour dire : «nous sommes là».

C’est inadmissible, car sous d’autres cieux la journée internationale de l’infirmière est un événement national, une fête au vrai sens du mot et ce en hommage aux infirmiers et infirmières pour le travail qu’il faut. Chez nous, on fête la journée du SIDA, celle de la tuberculose, du diabète, du cœur. Bref, on fête toutes sortes de maladies et on ignore celles et ceux qui soignent ces maladies.

Une profession ignorée

Il est curieux, triste et dommageable de constater combien d'une année sur l'autre on a tendance à se répéter, à dire la même chose, à seriner le même refrain. Plusieurs gouvernements se sont succédé et ont eu entre leur mains le dossier des infirmiers, plusieurs ministres de la Santé ont été sensibilisés aux droits légitimes de ce corps de métier et plus exactement depuis feu Rahali Rahal.

Que de temps a passé, que de ministres de la Santé, mais il faut avouer que peu de choses ont été réalisées. Oui, la profession infirmière continue à être ignorée, malmenée quand elle n'est pas maltraitée. Preuve en est le nombre d’agressions dont sont victimes chaque jour les infirmières et infirmiers, dans l’exercice de leur fonction, au moment où les conditions de travail sont de plus en plus difficiles et où la surcharge de travail est de plus en plus pénible, exacerbée par la pénurie d’infirmiers que connaît notre pays, puisqu’il y a un déficit estimé a près de 10.000 infirmiers.

Il nous faut regarder la réalité bien en face, dire les choses comme il se doit, ne pas nous voiler la face et dire que l’année est belle… Cette profession que l’on qualifie de noble est en train de souffrir. En effet, la pénibilité de ce métier, notamment dans les hôpitaux, et plus particulièrement les services chauds (urgences, soins intensifs, oncologie, bloc opératoire…) est intenable, à tel point que nombre d'infirmiers et d'infirmières usent de stratagèmes pour ne pas venir travailler, d’autres quittent carrément la profession au bout de quelques années, créant par là même un vide, ce qui aggrave encore plus les conditions de travail.

Une force de changement

Les infirmiers(ères) ont de tous temps joué un rôle important dans le développement humain, dans l’essor économique, social, culturel de notre pays. Ils sont présents là ou le devoir les appelle, en milieu urbain, rural, dans les zones enclavées, lors des manifestations, c’est une force de changement qui est au service de la nation.

Cette réalité est aujourd’hui mise en avant pour rendre justice aux professionnels de santé et plus particulièrement les infirmiers et infirmières. D’ailleurs le thème retenu pour l'année 2014 par le Comité international des infirmiers pour célébrer cette journée - «Les infirmières, une force pour le changement : une ressource vitale pour la santé» - reflète à lui seul toutes les préoccupations et les enjeux qui animent les infirmiers à travers le monde, en ce qui concerne l'accès aux soins des populations là où elles se trouvent, indépendamment des conditions des uns et des autres.

Parler de l'accès aux soins pour tous, du droit à la santé, c'est permettre à tous d'être bien accueillis, bien soignés, c'est réduire le fossé qui sépare ceux qui ont des moyens et qui peuvent se permettre de bien se faire soigner et ceux qui n'ont pas de moyens, mais qui ont le droit d'être convenablement soignés, et là les infirmiers jouent un rôle de premier plan, ils sont présents et assurent pleinement leur responsabilité .

Parler des infirmiers et dire que c’est une force de changement, une ressource vitale pour la santé, c’est reconnaître à ces professionnels une légitimité souvent bafouée.

Les infirmiers, une force de changement, c’est aussi et surtout l'amélioration de l'accès et de l'équité des soins, c'est la démocratisation de ces mêmes soins, pour une plus grande justice sociale, les infirmiers contribuent grandement à la réalisation de tous ces objectifs par leur implication sans réserve, leur dévouement et leur dextérité, leur savoir et savoir faire, qu’ils mettent au service de nos citoyens .

Les infirmiers, une force de changement, assurément c’est oui, car les infirmiers contribuent là ou ils sont, à l’hôpital ou au centre de santé, au CHU ou au dispensaire rural à garantir à tous, sans exception aucune, à celles et ceux qui ont une couverture médicale (AMO) ou RAMED, aux riches comme aux pauvres de pouvoir de bénéficier de prestations de qualité indépendamment de leur moyens, statut social ou lieu de résidence.

Les infirmiers au cœur de toute réforme

Il est clair pour tous ceux qui connaissent le secteur de la santé marocain que le succès de toute réforme dépendra en grande partie des ressources humaines pour la santé. Sans mobilisation des professionnels de la santé on ne fera pas fonctionner le système de santé; sans mobilisation des professionnels de la santé on ne peut espérer moderniser le secteur.

Il faut plus de professionnels et des personnels d’un type nouveau et de compétences diversifiées pour fournir l’expertise nécessaire pour s’attaquer aux déterminants de la santé (et de la mauvaise santé). Il faut des professionnels d’un type nouveau et de compétences diversifiées, en bien plus grand nombre, plus à l’écoute des populations, pour pouvoir répondre aux attentes des populations d’avoir accès à des soins

La modernisation du système de santé est nécessaire à la santé des populations marocaines, qui mérite ce qu’il y a de mieux en matière de soins, c’est aujourd’hui une réalité qui se concrétise à petits pas certes, mais qui est là, c’est grâce à la nouvelle dynamique qui est insufflée par le ministre de la santé qui a à cœur la mise en place de réformes sérieuses qui si elles sont conduite par tous amélioreront considérablement le système de santé du Maroc

Mais il faut avoir toujours présent à l’esprit que la mise en place d’une réforme ou que le changement d’un système de santé, ce n’est pas uniquement une question de décret.

Il n’y a pas de réforme possible si l’on ne réfléchit pas préalablement à son appropriation par les acteurs, et en premier lieu par les professionnels de la santé et plus particulièrement les infirmiers(ères) qui sont le véritable fer de lance de notre système de santé.

Rendre hommage aux infirmiers

Célébrer la journée internationale de l'infirmier, c'est l'occasion pour nous de rendre ici dans ces colonnes un très grand hommage à toutes les infirmières, à tous les infirmiers. Des professionnels de santé qui œuvrent inlassablement de jour comme de nuit au chevet des malades, que ce soit au niveau des hôpitaux publics, des cliniques privées, des cabinets privés et qui assurent un travail inestimable auprès des personnes diminuées physiquement et psychologiquement pour les aider, les soutenir, les réconforter, les soigner, les soulager…

Un travail qui est souvent accompli dans des conditions difficiles, pénibles et harassantes surtout que les infirmiers sont souvent aculés à faire face à une charge de travail très lourde eu égard à la pénurie d'infirmiers et infirmières qui touche notre pays où le besoin est aujourd'hui estimé à plus de 10.000 infirmiers.

Aujourd'hui, les responsables du département de la Santé se doivent de se pencher sérieusement sur la situation des infirmiers et infirmières, des ressources humaines qui constituent la véritable richesse de ce département, car sans infirmiers, il n'y aura pas de santé et sans santé, il n’y aura pas d’éducation, pas de production, pas de développement, pas d’essor…

Donc pour pouvoir réellement promouvoir et garantir des soins de qualité pour l'ensemble de nos concitoyens, il est capital d'améliorer la qualité de vie des infirmiers et des infirmières et de créer de bonnes conditions de travail pour l'exercice de cette fonction à vocation humanitaire.

Écrit par Ouardirhi Abdelaziz