Cette année, le nombre de cas d’autisme diagnostiqué chez des enfants sera supérieur aux diagnostics de diabète, de cancer et de SIDA additionnés». Un constat alarmant qui ne semble pas faire réagir les autorités marocaines ! «Nous travaillons d’arrache-pied depuis 10 ans pour sensibiliser les pouvoirs publics à l’importance et aux dangers de l’autisme, mais nos efforts n’ont servi à rien», explique M’hammed Sajidi, président de l’Association, «vaincre l’autisme au Maroc» et «Vaincre l’autisme international».

En 2009, à la suite du Rapport sur la situation de l’autisme au Maroc publié par «Vaincre l’autisme Maroc», le gouvernement marocain semble prendre conscience de l’urgence et de l’inacceptable de la situation des enfants, adolescents et adultes atteints d’autisme. Un Comité de stratégie pour la prise en charge de l’autisme voit alors le jour. Cependant, quelques réunions préliminaires, la nomination d’une consultante et un questionnaire envoyé aux associations concernées par l’autisme en vue de réaliser un état des lieux plus tard, la bonne volonté a laissé la place à l’immobilisme depuis novembre 2010. «Nous avons mis sur pied un rapport complet avec une stratégie de prise en charge des malades dans les établissements publics, des plans de formation, la mise en place de centres de référence permettant dépistage et diagnostic précoce, mais nous n’avons eu aucun retour», explique le président de l’Association.

Un comité avait pourtant vu le jour, il y a deux ans, pour traiter du dossier de l’autisme au Maroc, mais ce comité n’a pas donné signe de vie depuis. Autant de déceptions que de colère puisque les parents à enfants autistes sont nombreux et les plus lésés sont bien sûr les plus démunis. «Des parents de malades se sont mobilisés pour créer des classes spécialisées, mais ces classes sont couteuses et seule une couche de la population peut se permettre ce luxe». Un luxe dans le malheur et la difficulté puisque les politiques ont le pouvoir de soulager ces familles en difficulté, désirant voir leurs enfants suivre une scolarité quasi normale. Ainsi, en tant que représentante des familles, l’Association revendique du gouvernement marocain la mise en place d’un Plan autisme, le respect de la dignité des personnes autistes et de leurs familles par le respect de leur droit d’accès aux meilleurs traitements avérés et leur droit au choix de leur éducation, la mise en place de mesures visant à rappeler aux professionnels leur devoir et obligation d’être à jour dans la connaissance des avancées scientifiques et médicales internationales en matière d’autisme, la mise en place de procédures et dispositifs d’évaluation des compétences des professionnels de la santé et de l’éducation, le droit des enfants autistes d’accéder à la scolarisation au sein de l’école publique et à l’éducation dans un environnement professionnel compétent et que les facteurs de blocage cessent pour qu’une reconnaissance stratégique soit enfin mise en place.

Un appel à l’aide en cette journée de l’autisme afin de sensibiliser le nouveau gouvernement marocain et la société civile à ce grave problème de santé publique. Une manière de penser à ces enfants perdus dans leur monde et de leur ouvrir les portes du nôtre : un monde qui les acceptera comme ils sont et qui s’adaptera à qui ils sont. À bon entendeur.
L’autisme en bref

D’après la classification CIM 10 de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’autisme est un Trouble envahissant du développement (TED) qui affecte les fonctions cérébrales. C’est un trouble sévère et précoce du développement de l’enfant apparaissant avant l’âge de 3 ans, un trouble d’origine neurobiologique dont le diagnostic se fait sur la base de caractéristiques du comportement et du développement. Grâce à la précision des outils de diagnostic et de dépistage, la communauté scientifique internationale met l’accent sur l’hétérogénéité de l’autisme en le définissant dorénavant comme «Troubles du spectre autistique» (TSA). Trois éléments cumulatifs caractérisent l’autisme : un trouble de la communication, une perturbation des relations sociales et des troubles du comportement. Toutefois, le trouble autistique connaît des variations importantes selon les individus, tant au niveau des manifestations du handicap qu’au niveau de l’intensité de celui-ci. Ces variations conduisent à des facultés d’apprentissage souvent étonnantes ou à des blocages qu’il faut surmonter avec patience.

Repères

L’autisme en chiffres, au Maroc :

• La prévalence de l’autisme est estimée à 1 naissance sur 100.
• 340 000 personnes aujourd’hui touchées par l’autisme, plus de 1 million de personnes concernées.

Jihane Bougrine